• Recherche
  • Urbanismes, Territoires et Sols
  • Sites pollués et friches

Le projet en deux mots

Le projet ARMAMDE cherche à développer une technique nouvelle et efficace pour améliorer la qualité des eaux souterraines polluées par des CAP-O et HAP en utilisant des adsorbants régénérables de type zéolithique.

Contexte et enjeux

Les Composés Aromatiques Polycycliques (CAP) regroupent une large gamme de composés aromatiques et comprennent notamment les Hydrocarbures Aromatiques Polycycliques (HAP), connus pour leurs effets toxiques sur l’Homme (notamment des effets systémiques ou cancérigènes) et l’Environnement et les CAP contenant un ou plusieurs hétéroatomes, comme en particulier les Composés Aromatiques Polycycliques Oxygénés (CAP-O). Ces derniers contiennent des groupes fonctionnels polaires de type carbonyles, hydroxyles ou carboxyles. Dans les pays à forte tradition industrielle, de nombreux sites présentent des sols contaminés par les HAP. Sur ces sites, les seuls Hydrocarbures Aromatiques Polycycliques suivis lors des diagnostics et programmes de surveillance sont les 16 HAP retenus comme polluants prioritaires par l’US EPA (US Environmental Protection Agency) dès 1976, en raison de leur occurrence et de leurs dangers, mais aussi de leur quantification aisée, en analyse de routine. Cependant, des travaux ultérieurs ont montré que d’autres familles de CAP, notamment les CAP-O, étaient également présents sur les sites contaminés par des HAP et pouvaient aussi contribuer à l’impact sur l’Homme et l’Environnement. 

En effet, les CAP-O sont présents dans les sources de pollution, au même titre que les HAP (issus par exemple d’industries productrices et utilisatrices de goudron de houille, créosote) mais sont également des produits de dégradation des HAP, générés par la photooxydation, l’oxydation chimique ou l’oxydation par les bactéries. Ils peuvent donc se former et s’accumuler lorsque les HAP sont dégradés, aussi bien en contexte d’atténuation naturelle, que lors de traitements de remédiation. Les CAPO sont des composés plus polaires que les HAP, donc plus solubles dans l’eau, cela implique une mobilité dans les sols (zones saturée et non saturée) supérieure à celle des HAP, ce qui a récemment été démontrée lors des travaux de la thèse de W. Almouallem, cofinancée par l’ADEME et l’Ineris (2018 – 2022). Enfin, les rares données de la littérature concernant la toxicité et l’écotoxicité des CAP-O sont insuffisantes pour conclure sur leur toxicité. Cependant, les éléments issus de la comparaison de leur toxicité avec celle des HAP, basés notamment sur les similarités de structure et de mécanisme d’action, semblent en faveur d’une toxicité de certains CAP-O similaire, voire supérieure, à celle des 16 HAP réglementés de la liste de l’US EPA. 

Ainsi, toutes ces données montrent que les CAP-O seraient des traceurs du risque sanitaire complémentaires aux HAP voire plus pertinents, à inclure dans les diagnostics et programmes de surveillance des sites contaminés par des HAP. Par ailleurs, au regard de ces propriétés, les CAP-O peuvent être considérés comme des candidats composés persistants, mobiles et toxiques (PMT). L’évaluation des substances PMT est proposée par l’Agence allemande de protection de l’environnement (UBA), en lien avec celle des substances préoccupantes selon la réglementation REACH, pour assurer la protection des ressources en eau (douce et potable) en tenant compte notamment de la voie d’exposition et du transport des substances spécifiques à ce milieu. Le besoin de caractérisation de ces composés dans les différents milieux environnementaux fait par ailleurs l’objet d’un subventionnement Européen de 40 M€ au travers du programme H2020 – Green Deal qui finance des projets sur les polluants persistants et mobiles (Topic 8.1). 

Actuellement, les CAP-O ne sont pas pris en compte lors de la caractérisation d’un site potentiellement pollué ou lors de suivis réglementaires de la qualité des eaux souterraines. Il en est de même lors du suivi des opérations de dépollution d’un site et du contrôle de leur efficacité. Seuls les 16 HAP US EPA sont considérés alors que leurs effets pourraient se potentialiser. Par ailleurs, certaines techniques de traitement des HAP comme l’oxydation chimique in-situ selon la réaction de Fenton ou encore des traitements basés sur la biodégradation des HAP, conduisent à la formation de CAP-O.

Objectifs

1. Objectifs scientifiques et techniques

L’objectif principal du projet est de développer une technique innovante et respectueuse de l’environnement, de dépollution des eaux souterraines par des HAP sans provoquer la formation de CAP-O et capable de traiter les CAP-O également, par capture des polluants sur un adsorbant à grande surface spécifique et régénérable.
Le projet ARMAMDE portera sur les axes de développement ci-dessous :
 

  • Synthèse de matériaux zéolithiques efficaces vis-à-vis de l’adsorption des HAP et des CAP-O. Ces matériaux seront fournis par la société Zephir Alsace, spécialisée dans la synthèse et la commercialisation de matériaux zéolithiques en tant que sous-traitant des laboratoires IS2M et LGRE (présentation de la société fournie en annexe).
  • Tests des adsorbants à l’échelle laboratoire (masse d’échantillon de l’ordre du gramme) : les performances des matériaux en adsorption de polluants organiques seront étudiées lors d’essais en mode statique (en batch) avec une optimisation des conditions opératoires comme la quantité d’adsorbant utilisé, les concentrations initiales en polluants, le pH des solutions.
  • Influence de la mise en forme des adsorbants zéolithiques (billes) sur leur capacité d’adsorption. Les adsorbants devront être mis en forme pour éviter les pertes de charge trop importantes lors de leur utilisation dans des filtres pour le traitement des flux d’eau. Cet aspect du programme est l’un des verrous qui devra être levé, puisqu’un des risques serait que l’adsorbant perde une partie voire la totalité de ses propriétés d’adsorption après mise en forme.
  • Mise au point de la méthode de régénération des adsorbants en vue d’une utilisation en mode multicycle adsorption/régénération. Cette partie du projet est également un verrou à lever, puisque le risque est de ne pas pouvoir régénérer complètement le matériau et donc de réduire voire perdre son efficacité de piégeage des CAP-O et HAP. La seconde problématique concernant ce point est que l’étape de régénération altère les propriétés texturales et structurales intrinsèques des zéolithes et diminue ainsi leurs performances.
  • Reproduire à l’échelle terrain sur site contaminé, les performances obtenues en laboratoire sur des eaux souterraines polluées. La technique de dépollution utilisée avec les zéolithes (de l’ordre de la centaine de kilogrammes) sera le pompage et traitement. L’eau contaminée sera extraite par pompage puis injectée au travers de filtres remplis d’adsorbants à tester. Les zéolithes seront comparées, dans cette configuration, aux charbons actifs. Une autre approche sera également testée, à titre comparatif et consistera à injecter un adsorbant commercialisé par la société REGENESIS directement dans l’aquifère puis de mesurer in situ l’effet d’adsorption de celui-ci en monitorant la qualité des eaux souterraines au niveau de la zone d’injection. 

Le projet ARMANDE est novateur dans le domaine des sites et sols pollués car il permettra de valider une méthode de dépollution capable de traiter à la fois les HAP et les CAP-O à l’échelle du terrain. Il s’agit d’une étape cruciale avant toute phase d’industrialisation de la technologie. En termes de critères de réussite, il pourrait être considéré que l’objectif sera atteint si l’adsorbant zéolithique régénérable, est capable de dépolluer efficacement les eaux souterraines du site pollué.

2. Objectifs socio-économiques et réglementaires

A l’issue du projet, les bénéfices attendus en termes de santé publique sont une prise en compte de la formation potentielle de CAP-O lors de l’utilisation de certains procédés de remédiation des sites contaminés par des HAP et donc l’adaptation du choix des techniques de remédiation utilisées sur ces sites, afin d’une part de ne pas former de CAP-O et d’autre part de pouvoir traiter les CAP-O présents dans le panache de pollution.

3. Objectifs environnementaux

Les nouvelles connaissances qui seront acquises au cours de ce projet s’inscrivent dans une optique de meilleure prise en compte des contaminants émergents. En effet, il s’agit ici de prendre en compte les contaminants accompagnant les HAP, qui pourraient également être formés lors de procédés de traitement et pourraient mener à un risque sanitaire inacceptable s’ils étaient suivis. In fine et dans un temps ultérieur au projet, il pourra être proposé une adaptation des diagnostics et des programmes de surveillance des sites pollués par des HAP, visant à une amélioration de la qualité des sols, de l’eau et de la biodiversité. De plus, la valorisation des connaissances générées par le projet pourra servir à informer le grand public, les professionnels et les différents acteurs du domaine des sites et sols pollués sur les risques relatifs aux CAP-O afin d’améliorer la prévention vis-à-vis de ces composés. Il pourra également s’agir d’une amélioration de la qualité des différents milieux où les CAP-O sont également retrouvés comme la qualité de l’air.

Déroulement

L’objectif du projet ARMAMDE est de valider à l’échelle du terrain, une technique de dépollution des eaux contaminées par des HAP, sans provoquer la formation de CAP-O ainsi que d’être capable de traiter les CAP-O également. La voie envisagée pour atteindre cet objectif est l’utilisation d’adsorbants régénérables de type zéolithique pour piéger les polluants organiques présents dans l’eau. Ce projet contribuera à améliorer les techniques de traitements des eaux souterraines, par le développement d’une technique de dépollution performante, respectueuse de l’environnement et économiquement viable, de par l’utilisation d’adsorbants aisément régénérables par simple traitement thermique. 

L’ensemble des compétences dans le projet ARMAMDE sont réunies à la fois à l’échelle des acteurs INERIS et VALGO (expertise scientifique en SSP et entreprise de dépollution) et à l’échelle du laboratoire (CNRS et SATT Conectus par délégation de l'UHA) pour effectuer l’ensemble des tâches suivantes : caractériser et quantifier la pollution sur un site atelier ; développer, caractériser et tester des adsorbants minéraux aux deux échelles (laboratoire et site atelier) ; puis tester la régénération de ces matériaux dans le cadre de la remédiation d’eaux souterraines polluées par des mélanges CAP-O/HAP. Si l’adsorption sur charbon actif est déjà utilisée in situ, celui-ci n’est ni récupéré ni régénérable. L’originalité et le caractère innovant du projet ARMAMDE est de se focaliser sur des matériaux durables, car facilement régénérables par traitement thermique. Les capacités d’adsorption mesurées par les zéolithes seront bien sûr comparées à celles de charbons actifs, à la fois en laboratoire et sur un site atelier dans des conditions expérimentales et de terrains identiques pour les deux types d’adsorbant.

Partenaires

SATT CONECTUS ALSACE (coordinateur), CNRS, Ineris, VALGO

Détails du projet

Début et fin de projet : Juin 2024 à Décembre 2027

670k€ Montant total du projet

321k€ Aide projet

Haut de page