Tribune de Sylvain Waserman, Président de l’ADEME
Le techno-solutionnisme est souvent un alibi pour ne pas agir dès aujourd'hui. Ayons confiance en la créativité, en l'inventivité de l'esprit humain et en nos chercheurs, qui au quotidien, œuvrent pour la transition écologique.
A cette occasion, découvrez ma tribune consacrée au décloisonnement de la recherche scientifique, méthode qui permettra de répondre pleinement aux enjeux de société et imaginer les modèles de demain.
Dans notre société de l’instantanéité, tout le monde peut s’exprimer sur tous les sujets, les informations non vérifiées occupent la même place que les faits, les conspirationnistes gangrènent les espaces d’information et les intérêts sous-jacents sont souvent cachés. C’est dire que la transition écologique, qui s’inscrit aussi bien dans l’action concrète immédiate qu’à long terme, nécessite de repenser de nouveau le temps long, nécessaire à une certaine prise de recul, pour pouvoir relever ce défi de manière éclairée, à travers des choix fondés sur des connaissances scientifiques. L’objectif est tout autant de prendre les décisions solidement que de faciliter l’appropriation de ces choix par les citoyens.
L’ADEME, riche de son expertise scientifique et de son implantation territoriale, a pour mission d’éclairer -et parfois d’inspirer- la décision publique face aux enjeux complexes auxquels nous devons répondre. Cette voix de la science, portée par des femmes et des hommes aux compétences solides, tant dans les sciences dures que dans les sciences sociales, ancre l’agence de la transition écologique dans un rôle essentiel de « tiers de confiance » fiable et solide.
Tout d’abord, il s’agit de porter une perception positive et une forte intégration de la parole scientifique dans l’élaboration des politiques publiques nationales et locales, tout en restant à notre juste place. C’est essentiel pour structurer le débat, bâtir des projets et des stratégies, les mettre en œuvre et évaluer les résultats. Mais il nous faut aller plus loin, et développer sans cesse les liens entre la sphère de la décision politique et celle de l’analyse scientifique. En tant qu’opérateur de l’Etat, l’ADEME assume pleinement son rôle de conciliateur et de facilitateur entre parole scientifique et parole politique. Nous devons poursuivre en ce sens avec la volonté d’œuvrer pour le bien commun.
Ensuite, nous devons sans cesse interroger la manière dont se construit cette voix de la science. Nous devons décloisonner les approches et les disciplines pour aller vers des recherches situées aux interfaces. Réussir à conjuguer sciences dures et sciences sociales pour répondre pleinement aux enjeux de société et imaginer les modèles de demain. Ce décloisonnement nécessite de la co-construction avec un dialogue exigeant entre chercheurs, acteurs publics, acteurs économiques, échelons nationaux et locaux, et la société civile. Je suis convaincu que c’est par cette méthode de coopération volontariste que nous mettrons en œuvre une transition écologique au plus près des réalités territoriales et répondant aux besoins des citoyens.
En cela, les équipes de l’ADEME devront encourager la recherche participative qui donne toute sa place au dialogue citoyen, confronte les connaissances aux attentes et aux valeurs de la société et porte des solutions désirables et qui ne laissent personne au bord du chemin. La voiture en est le parfait exemple. Parce que beaucoup de Français ont besoin de leur voiture pour se déplacer, il serait inenvisageable d’interdire son usage. A nous de construire des solutions alternatives qui répondent à la fois aux besoins des citoyens et aux enjeux écologiques : développement de véhicules légers dans le cadre de notre programme Extrême défi mobilité, développement du covoiturage, des réseaux de transports en commun, des pistes cyclables, des véhicules électriques, etc.
L’ADEME est l’un des rares acteurs à même de réussir cette approche consubstantielle de la réussite de la transition écologique. Faciliter le dialogue citoyen, imaginer des nouveaux espaces et des nouvelles formes d’intelligence et d’appropriation collectives, fédérer l’ensemble des acteurs, coconstruire des projets de recherche qui répondent aux réalités des territoires : c’est par ce type d’approche que nous atteindrons nos objectifs de sobriété et de neutralité carbone à l’horizon 2050.